Despite a significant weight in the economy – “livestock farming accounts for more than 5% of GDP” – and in terms of jobs, local milk production in West Africa suffers from competition from imports of milk powder whose prices “do not reflect […] the production costs levels of […] major exporting countries”. Here we find an already well-known statement concerning the level of international prices outside periods of food crisis: they tend to be magnetized by the level of the costs of the most competitive country, in this case New Zealand for milk, while the theory of supply and demand would rather have them align on the “equilibrium price”, ie the level of costs of the less competitive producers but that remain necessary to satisfy the demand.
Unlike the poultry sector used in comparison – and for which Burkina Faso and Senegal are now self-sufficient thanks to a trade policy deemed satisfactory by the authors of the report, the dairy sector has not benefited from the same protections. Milk powders are currently taxed at 5% on import, a rate that would be brought to zero in the framework of the Economic Partnership Agreements signed with Europe but not yet ratified.
However, given the challenge of developing consumption, the experts are considering a development of production by progressive substitution from imports and seeking complementarity with dairy products from powder imports. The Nigerian strategy is cited as an example, as the region’s demographic giant has negotiated “the increase in local milk collection by foreign cooperatives like the Dutch Friesland Campina, with an increase from 3% to 10% of the total production over 10 years”.
In parallel with the ECOWAP “Regional Offensive for Local Milk Promotion”, aimed at increasing production, collection and promoting the development of processing, GRET experts advised ECOWAP to combine an increase of customs tariff and a reduction of VAT on dairy products in order to stimulate local production while not penalizing consumers. They also advise technical support and support for the structuring of actors as well as actions to promote products from the local milk sector.
Christopher Gaudoin, Strategic Analyst
Production, consommation et importations laitières
Une place importante de l’élevage dans les économies nationales et familiales
Avec un effectif régional estimé à plus de 65 millions de têtes de bovins, plus de 200 millions d’ovins et caprins, et 2,6 millions de camélins, l’élevage joue un rôle majeur dans l’économie ouest-africaine, et constitue même l’un des principaux facteurs d’intégration régionale .
L’élevage représente plus de 5 % du Produit intérieur brut (PIB) des Etats de la région. Ce taux peut atteindre, voire dépasser 10 à 15 % dans certains pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger. La part des produits d’élevage représente environ 25 % du PIB agricole de l’Afrique de l’Ouest. Cette contribution est bien supérieure dans les pays sahéliens : 35 % au Burkina Faso, 28 % au Mali et 30 % au Niger .
Les principaux effectifs bovins se situent dans les pays sahéliens (Niger, Mali, Burkina Faso) et au Nigéria. On note aussi une concentration de plus en plus importante dans les zones soudaniennes agro-pastorales (zones cotonnières et arachidières). Dans les pays sahéliens, le lait de vache représente entre 20 et 40 % du chiffre d’affaires de l’élevage. La Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Bénin sont dans une situation intermédiaire par rapport à la Guinée Bissau et le Togo où les effectifs sont relativement faibles.
Compte-tenu de leurs effectifs animaux (toutes espèces confondues), il apparaît que le Mali et le Niger sont potentiellement les plus grands producteurs de lait dans la zone Uemoa d’après l’étude effectuée par le Cirad en 2013 sur la zone Uemoa.
Les données FAOSTAT pour les pays de la Cedeao en 2016 indiquent un volume total de produc-tion de lait de vache de presque 2 500 milliers de tonnes avec environ 528 milliers de tonnes pour le Niger et 522 milliers pour le Nigéria (soit environ 20 % de la production chacun), 300 milliers de tonnes pour le Mali, 200 milliers pour la Sierra Léone et entre 150 et 124 milliers pour la Guinée Bissau (150), la Guinée (129) le Burkina Faso (128) et le Sénégal (124). On note de très grandes différences avec les chiffres obtenus auprès des ministères pour le Burkina Faso et aussi pour le Sénégal. Ces différences confirment qu’il existe de fortes incertitudes sur les statistiques de production, qui sont très difficiles à évaluer, étant donné qu’une faible partie de la production est commercialisée et que les recensements animaux sont rares et souvent incomplets.
L’élevage pastoral fournirait 70 % de la production laitière, le reste provenant des systèmes agro-pastoraux et des systèmes intensifs d’élevage . La production de lait local couvre environ 2/3 du lait consommé (50% si l’on ne considère que le lait de vache), mais les situations sont très contrastées :
- dans les zones nord-sahéliennes, de l’intérieur (Burkina Faso, Mali, Niger), à tradition de production et de consommation laitière, la population consomme essentiellement du lait local. Le taux d’autosuffisance laitière y est généralement élevé (50 à 80 %20) ;
- dans les zones sud-sahéliennes et encore davantage dans les zones tropicales humides et côtières (Sénégal), la tradition laitière est plus faible, la consommation repose davantage sur les importations de lait en poudre. De plus, l’urbanisation des zones côtières s’est ac-compagnée d’un accroissement de la consommation de lait sous forme de poudre de lait ou de lait concentré et donc d’une dépendance forte vis-à-vis des importations .
L’évolution sur 15 ans du volume de production total de lait de vache de la Cedeao montre une tendance générale à la hausse depuis 2000 avec un tassement ces dernières années du fait d’une baisse de la pluviométrie dans la zone sahélienne. Cette croissance est moins marquée pour le Sénégal et le Burkina Faso dont les données sont plus faibles que celles indiquées par les ministères.
Du fait du manque de débouchés sécurisés, la majorité des exploitations agropastorales n’investissent pas dans l’amélioration des performances laitières de leurs animaux. Les vaches produisent entre un et quatre litres de lait par jour, sur une période souvent inférieure à une centaine de jours22. La croissance de la production est surtout liée à l’augmentation du cheptel avec des variations interannuelles liées aux conditions climatiques (pluviométrie). En revanche, en périphérie des villes secondaires et dans les bassins laitiers où des circuits de collecte sont mis en place par des centres de collecte, des mini-laiteries ou des industries laitières, là où existent des opportunités de commercialisation, les systèmes d’élevage agropastoraux s’intensifient. Les éleveurs valorisent les compléments alimentaires disponibles dans la zone (résidus de récolte, fourrages, graines et tourteaux de coton, fanes et tourteaux d’arachide, son de céréales, etc.). Dans les bassins laitiers, les troupeaux sont parfois séparés, une partie des animaux restant sur place pendant qu’une autre partie part en transhumance .
[…]Une demande en forte croissance satisfaite en partie par des importations
La consommation de lait par habitant en Afrique de l’Ouest demeure globalement faible (environ 23 kg/an pour la Cedeao ) avec de très grandes disparités et en-dessous des recommandations de l’OMS qui préconisent une consommation de 70 à 90 Eq kg/an/habitant.
La croissance démographique, l’urbanisation et l’amélioration du pouvoir d’achat des classes moyennes se traduisent par une augmentation de la demande en produits laitiers. Face à ce marché porteur, les soutiens publics pour dynamiser la production locale s’avèrent bien insuffisants. Malgré une augmentation de la production régionale, elle reste globalement en-dessous des besoins de consommation. Cependant, au Burkina Faso, au Mali ou au Niger, la production locale est bien supérieure aux importations. Dans tous les pays, les importations viennent prioritairement approvisionner les marchés urbains. Comme nous l’avons mentionné, il existe cependant de fortes incertitudes sur les statistiques de production, qui sont très difficiles à évaluer, étant donné qu’une faible partie de la production est commercialisée.
Les importations ouest-africaines ne cessent d’augmenter, passant de 0,6 en 1996 à 1,9 millions de tonnes équivalent lait en 2013 (FAOSTAT, 2016). La dépendance globale de la région vis-à-vis des importations, notamment de poudre de lait, tend à s’accroître depuis une dizaine d’années, après une chute des importations et de la consommation en 2007/2008 liée à la flambée des prix sur le marché mondial. Néanmoins ces importations ont surtout suivi la courbe de croissance démographique (de l’ordre de 3 % par an).
La progression des importations après 2010 est liée principalement à l’augmentation des importations de poudre de lait réengraissée, qui sont aujourd’hui plus importantes que les importations de poudre de lait. Ces données doivent cependant être interprétées avec précaution, en raison d’un manque de transparence des statistiques : les importations de poudre de lait réengraissée apparaissent dans la classification douanière sous une ligne tarifaire « préparations alimentaires diverses » (190190) distincte de celle de la poudre de lait. Mais, la ligne tarifaire 190190 recouvre également d’autres produits, même s’ils concernent des volumes plus faibles que la poudre de lait reconstituée (extraits de malts, produits à base de farines, etc.). De plus, il n’y a pas de règle générale commune à tous les pays de la Cedeao sur la façon dont cette poudre réengraissée de lait est déclarée en douane. Enfin une partie des importations proviennent de pays tiers de la région sans que l’origine réelle ne soit précisée. Une partie de ces réexportations sont à base de matière grasse végétale.
L’évolution des importations du Sénégal illustre également cette montée en puissance de la poudre de lait réengraissée, parfois qualifiée de « lait végétal ». On voit que, aujourd’hui, près de deux-tiers des importations laitières du pays sont constituées de poudre de lait réengraissée. De plus, ces chiffres correspondent à une période antérieure à la flambée actuelle du prix mondial du beurre.
Concernant le Burkina Faso, l’appréciation de la montée en puissance des importations de poudre de lait réengraissée est plus complexe du fait des problèmes de fiabilité des données statistiques douanières. Une partie des importations déclarées comme lait en poudre est en effet très certainement constituée de poudre de lait réengraissée. De fait, les importations de « lait végétal » apparaissent selon les statistiques comme négligeables.
[…]L’Accord de Partenariat Economique (APE)
En 2014, l’Union Européenne a paraphé avec l’Afrique de l’Ouest un accord de libre-échange, intitulé Accord de Partenariat Economique. Pour entrer en vigueur, cet APE devra être signé par les Chefs d’Etat, puis ratifié par les parlements des parties africaine et européenne de l’accord (et, pour la partie européenne, le Parlement européen en tant que tel). Dans le cadre de cet accord, les pays de la région (pays membres de la Cedeao et Mauritanie) s’engagent à libéraliser leurs marchés au profit des produits européens pour 75 % des lignes tarifaires. La libéralisation se déroule au maximum sur 20 ans, mais sur cinq ans pour certains produits (dont la poudre de lait). Le marché européen resterait quant à lui ouvert aux produits de la région ouest-africaine sans droits de douane ni quotas, comme cela était globalement le cas précédemment (depuis leur indépendance pour les anciennes colonies françaises et depuis la Convention de Lomé I pour les pays anglophones).
A l’origine des APE, on trouve la création de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) en 1995 dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord de Marrakech de 1994 qui vise la libéralisation des échanges. En effet, les accords de Lomé (la première Convention de Lomé a été signée en 1975) s’inscrivaient en infraction avec le principe de la Nation la Plus Favorisée (NPF) du GATT (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) et de l’OMC, dans la mesure où les concessions commerciales accordées par l’Union européenne aux pays ACP (Afrique Caraïbes Pacifique) étaient discriminatoires vis-à-vis des autres pays en développement. Il ne s’agissait pas non plus d’un accord de libre-échange (article XXIV du GATT), dans la mesure où il n’y avait pas réciprocité, car les pays ACP n’appliquaient aucune préférence commerciale au profit des produits provenant de l’Union européenne. Ainsi, le nouveau contexte multilatéral né de la création de l’OMC a rendu plus difficile la poursuite du dispositif de préférences unilatérales, les règles préexistantes (NPF, etc.) prenant un caractère plus contraignant. Lors de la conférence ministérielle de Doha, l’UE et les pays ACP avaient demandé, négocié et obtenu une dérogation à la clause de la Nation la Plus Favorisée, valable jusqu’à la fin 2007.
Différentes possibilités s’offraient à l’Union européenne :
- le remplacement du système de préférences non réciproques par l’établissement de Zones de Libre-Echange (ZLE),
- l’octroi des préférences accordées aux pays ACP à l’ensemble des PED (Pays En Développement),
- l’alignement des préférences des pays ACP sur celles de l’ensemble des PED et PMA (Pays les Moins Avancés),
- la demande de dérogations supplémentaires à l’OMC,
- l’extension du concept de PMA au niveau régional en considérant les régions ACP comme des « régions PMA32 », ce qui aurait permis le libre accès au marché européen sans exiger une ou-verture commerciale réciproque,
- l’établissement d’accords de coopération économique à mi-chemin entre la non-réciprocité et la réciprocité totale.
L’Union européenne, souhaitant garder un certain niveau de protection de son économie vis-à-vis des importations en provenance des PED et accroitre ses exportations vers les marchés ACP, opta pour la première solution.
A ce jour, la négociation d’un APE régional n’a cependant pas abouti en raison de l’opposition du Nigéria, sous la pression de la société civile et du secteur privé qui voient dans l’APE une menace pour les industries locales.
La stratégie des États ouest-africains a été de revoir dans le cadre de la préparation de l’APE l’ensemble des produits dits sensibles et peu sensibles afin de décider lesquels devraient être protégés ou libéralisés. A l’issue des négociations, 100 % des produits de la 5ème bande (catégorie 4) du TEC Cedeao ont été exclus de la libéralisation et quelques autres produits de la 4ème bande.
Ainsi le lait liquide, le fromage, les yaourts restent protégés. Par contre la poudre de lait conditionnée en sac de 25 kg (y compris la poudre de lait réengraissée), auparavant à 5 % de droits de douane, sera libéralisée en 5 ans pour atteindre 0%. Cette libéralisation supplémentaire montre bien la volonté des politiques de favoriser le développement des industries laitières locales qui transforment la poudre de lait, même si cela se fait au détriment de la filière locale. Concernant la viande de volaille, elle reste exclue de la libéralisation.
Les raisons de la signature de l’APE par les États africains sont multiples. La signature résulte :
- d’une part de pressions de l’Union européenne, aussi bien sur les pays non PMA qui risquaient de perdre le libre accès au marché européen pour leurs produits que sur les pays PMA qui auraient de toute façon bénéficié du libre accès au marché européen dans le cadre du régime commercial Tout sauf les Armes (TSA) instauré dès 2000, mais qui sont notamment dépendants de l’aide publique au développement européenne,
- d’autre part, de choix politiques assumés de certains gouvernements ouest-africains en faveur de la libéralisation.
Le choix d’inclure dans la liste des produits sensibles la plupart des produits agricoles répond à leur volonté de protéger leur agriculture. Par contre, le choix de libéraliser la poudre de lait (tout comme d’autres matières premières industrielles d’origine agricole) répond principalement à la volonté de favoriser le développement d’industries de transformation nationales. La baisse des droits de douane sur la poudre de lait doit certes être relativisée, les 5% actuels du TEC correspondant déjà à un niveau de protection très faible. Son intégration dans l’APE rend cependant beaucoup plus complexe une éventuelle élévation future du droit de douane dans le cadre d’une révision du TEC.
Concernant la baisse des droits de douane sur la poudre de lait, l’ensemble des pays membres de la Cedeao semble adhérer à cette stratégie destinée à faciliter l’accès de la poudre de lait au segment de la grande consommation au moyen du développement d’entreprises laitières transformant de la poudre de lait importée. Cependant, le Nigéria cherche à mettre en œuvre une stratégie de développement de la filière locale en augmentant la production et en négociant l’augmentation de la collecte de lait local par les coopératives étrangères comme celle hollandaise Friesland Campina, avec un passage de 3 % à 10 % de la production sur 10 ans .
Par ailleurs la Côte d’Ivoire et le Ghana ont chacun signé un APE intérimaire avec l’Union européenne. La mise en œuvre de ces APE intérimaires constitue un risque pour l’intégration régionale : les produits libéralisés dans le cadre de ces APE pourront pénétrer sur le marché ouest-africain sans droits de douane, avec un risque de réexportation vers les autres pays de la région si les mécanismes de contrôle des règles d’origine sont appliqués de façon laxiste.
La Politique agricole commune de la Cedeao (ECOWAP) et l’Offensive pour la promotion du lait local
Constatant l’accroissement constant des importations alimentaires de l’Afrique de l’Ouest et tenant compte de l’enjeu d’assurer la sécurité alimentaire d’une population qui connaitra une forte croissance au cours des prochaines décennies, la Cedeao a fixé comme priorité de la nouvelle politique agricole commune (ECOWAP 2016-2025) le développement de la production agricole et des filières ouest-africaines en vue de répondre à la demande du marché régional. Le document d’orientation stratégique, dont le programme régional d’investissement agricole, de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PRIASAN) constitue le principal instrument d’opérationnalisation, assigne à la politique agricole l’objectif général de contribuer de manière durable à la satisfaction des besoins alimentaires et nutritionnels de la population, au développement économique et social et à la réduction de la pauvreté dans les États membres, ainsi que des inégalités entre les territoires, zones et pays. Une attention particulière est accordée aux produits animaux (lait et viande) C’est dans ce cadre que, à l’image de l’initiative régionale sur le riz, a été décidée la mise en place d’une Offensive régionale pour la promotion du lait local, en vue de réduire de façon substantielle la dépendance régionale aux approvisionnements extérieurs en produits laitiers.
L’objectif spécifique de l’initiative est d’accompagner toutes les initiatives et stratégies de développement des chaines de valeur du lait local, afin de :
- Augmenter de façon substantielle la production locale du lait frais en améliorant la pro-ductivité du cheptel ;
- Améliorer l’approvisionnement de l’industrie laitière régionale au moyen de la collecte d’au moins 25 % de la production régionale de lait local à l’horizon 2025 ;
- Promouvoir un environnement incitatif au développement des chaines de valeur du lait local.
L’offensive envisage dans son agenda la révision à la fois de la fiscalité intérieure et de la fiscalité de porte, c’est-à-dire des droits de douane et de la politique commerciale. Le contenu de l’offensive régionale devait être élaboré fin 2017 en vue de son approbation en 2018.
[…]Conclusion
L’objectif de développement de la filière lait local en Afrique de l’Ouest répond à des enjeux considérables pour la région :
- enjeu en termes d’emplois, de revenus et de développement socio-économique des zones pastorales et agropastorales. Dans ces territoires, les niveaux de pauvreté et de précarité des populations sont souvent élevés. Les jeunes, qui aspirent à des conditions de travail et de vie meilleures que leurs parents, cherchent souvent à en partir. Le développement des filières laitières peut contribuer à générer directement des emplois et des revenus supplémentaires. La croissance de l’activité d’élevage peut également contribuer à la transition agroécologique des zones agro-pastorales (restauration de la fertilité des sols par l’utilisation intensive de fumure organique) et donc à l’amélioration des rendements agricoles et des revenus issus des cultures.
Au-delà des zones pastorales et agro-pastorales, l’enjeu de développement économique et social concerne l’ensemble de la région et de sa stabilité dans un contexte social et sécuritaire fragile.
- enjeu en termes d’indépendance alimentaire par rapport au marché mondial. Dans un contexte où la population et la consommation laitière vont fortement progresser au cours des prochaines années (doublement de la population d’ici 15-20 ans et consommation croissante de lait par habitant) et où la flambée des cours mondiaux de 2007-2008 a montré le risque pour les consommateurs d’une trop forte dépendance par rapport au marché mondial, il s’agit également d’un enjeu global de sécurité alimentaire.
- enjeu en termes d’équilibre de la balance commercial et d’économie de devises,
- enjeu en termes nutritionnels, l’accroissement de la production laitière pouvant contribuer à une amélioration de la qualité du régime alimentaire des populations, et notamment des femmes enceintes et des jeunes enfants (apports de protéines, calcium, magnésium et vitamines).
L’exemple de la filière volailles nous montre l’intérêt, pour le développement d’une filière, de prix rémunérateurs pour les producteurs résultant d’une protection de fait du marché intérieur par rapport au marché mondial. Il nous renseigne également sur l’importance des habitudes alimentaires, lesquelles peuvent selon les cas, favoriser -comme dans le cas de la filière volaille- la consommation de produits locaux par rapport aux produits importés, ou au contraire la défavoriser. Les habitudes alimentaires sont le résultat de processus historiques. Elles évoluent au cours du temps et ne doivent pas être considérées comme une donnée figée. Des politiques adaptées peuvent donc favoriser des évolutions des habitudes alimentaires au profit de productions locales.
L’étude réalisée nous amène à recommander la mise en œuvre de politiques publiques en faveur du développement de la filière lait local combinant quatre types d’interventions :
- Appui à la structuration de la filière et concertation entre acteurs : l’organisation des acteurs (producteurs et transformateurs) pour une meilleure coopération et pour pouvoir être associés aux décisions politiques constitue un enjeu central. Il s’agit de contribuer :a) au renfor-cement des organisations nationales d’éleveurs et à l’organisation des autres acteurs de la filière, b) à la concertation locale entre les acteurs des territoires, c) à la structuration interprofessionnelle au niveau national et le dialogue avec l’Etat.
- Appui technique et financier aux acteurs de la filière : l’appui au développement de la filière locale est une nécessité pour que les mesures commerciales se traduisent effectivement par une meilleure couverture des besoins nationaux et une amélioration des revenus des acteurs de la filière. Il s’agit de contribuer à l’accroissement significatif des volumes de la production et de la transformation laitière au niveau des pays. L’appui devrait porter à la fois sur la production laitière, les dispositifs de collecte et la transformation, notamment par les mini-laiteries. Il importe que le soutien public s’inscrive dans la durée, de façon à accompagner efficacement des changements techniques souvent complexes et progressifs – notamment au niveau des élevages. Compte tenu des enjeux de développement socio-économique des zones pastorales et agro-pastorales, il importe que le soutien public vise prioritairement les agricultures et élevages familiaux de ces territoires.
- Qualité et promotion des produits issus de la filière lait local : dans les milieux urbains, mais aussi de plus en plus en milieu rural, des habitudes alimentaires favorables à la consommation de produits laitiers importés se sont souvent installées. La promotion des produits issus de la filière locale peut contribuer à ce que l’accroissement de la consommation laitière des années à venir se porte davantage vers les produits issus de la filière lait local et non des produits importés. Les interventions devraient viser à a) garantir une indication claire des ingrédients et notamment de la poudre de lait sur l’emballage et encadrer les images et noms utilisés sur les emballages et dans les messages publicitaires à la radio et à la télévision, b) créer et promouvoir un label « lait local » public au niveau des Etats ou de la CEDEAO pour faciliter le choix des consommateurs, c) promouvoir des produits à base de lait local dans les écoles en milieu urbain et rural et via des campagnes d’information grand public, et d) renforcer les associations de consommateurs.
- Amélioration de la compétitivité – prix des produits de la filière lait local. Dans un contexte marqué par un marché mondial très volatile et dominé par des acteurs et des pays disposant d’importants avantages de compétitivité, il importe de prévoir des actions spécifiques pour améliorer la compétitivité-prix du lait et des produits laitiers locaux par rapport à la poudre de lait importée, et notamment la poudre de lait réengraissée en matières grasses végétales. Dans certains cas, l’amélioration de la compétitivité-prix du lait local pourra résulter à terme par une baisse du prix du lait local liée à l’augmentation des niveaux de production et de productivité. Cependant, d’une façon générale, une protection supplémentaire face aux importations à bas prix de poudre de lait, et notamment de poudre de lait réengraissée, nous apparait comme une nécessité pour permettre aux actions directes de soutien à la filière lait local et de promotion de ses produits d’être pleinement efficaces. D’autres outils peuvent être utilisés en vue d’une amélioration de la compétitivité-prix et méritent d’être examinés et comparés. L’utilisation d’outils de politique commerciale nous apparait plus efficace que la baisse de la TVA sur les produits laitiers autres que la poudre de lait. Elle permet aussi de dégager des recettes budgétaires pouvant être destinées à l’appui aux filières locales ou au soutien des consommateurs les plus vulnérables (compléments de revenus, bons d’achat). Une combinaison de la hausse du TEC et de la baisse de la TVA sur les produits laitiers permettrait également que l’effet soit compensé pour les consommateurs tout en améliorant la compétitivité du lait local par rapport à la poudre de lait.